Pour créer, Jean-Michel puise dans ses collections d’images ou d’objets. Dans la profusion, entre beaucoup et trop, les collections s’enrichissent, se complètent, s’interpénètrent, représentation concrète de sa propre subjectivité. Il y a des expositions sur son chemin qui font surgir une foule, des bateaux, des portraits, des ailes, des regards… il y a des paysages et des personnages… Tout se structure, se révèle peu à peu, des « petits mondes flottants » à « la petite France ». Jean-Michel poursuit sa quête, il égrène les souvenirs enfouis, les références à l’enfance, les secrets familiaux, les obsessions… il cherche.
Florence Toussan

Le regard, c’est un geste physique qui passe par l’oeil, par le corps, le rapport aux autres corps et aux choses qui m’entourent : mon rapport à l’autre. Mes yeux regardent, mon esprit aussi. Le regard est ce par quoi je tisse des liens, je crée des oeuvres d’art. Il implique interprétation, pensée, identification à l’autre.

Un autre lieu du regard, plus douloureux pour moi, est celui des apparences. Il tend à diluer la pensée individuelle, qui se limite aux seules images physiques, dans une ivresse collective, où l’exigence d’exhibition est la règle.

Ce surinvestissement du regard permet à la fois d’éviter la relation à autrui et la prise en compte du monde intérieur. Je suis souvent contraint de détourner le regard pour ne pas être aveuglé, pour pouvoir continuer à découvrir, au milieu des choses visibles et invisibles.
Avec mes émotions, ma perception du monde, mon passé, ma vision est parcellaire, produite par l’intuition créatrice. Recommencer n’est pas un retour en arrière, mais un choix courageux vers du changement. C’est reconnaître que mon regard a changé parce qu’il crée constamment ses propres images, les renouvelle sans cesse ; c’est sans doute ça, le regard d’un artiste.

La mémoire , les souvenirs liés à l’histoire familiale : confrontation (fictive) en quelque sorte, Les visages du passé et du présent font face à celui de la petite fille ( France) qu’on avait oubliée, effacée.
On occulte toujours l’épouvantable, ces instants décisifs où la vie bascule, ces ruptures, ces sauts dans le vide. C’est tellement unique, monstrueux, hors norme, que ça concerne aussi toutes les vies d’après. J’ai essayé de fixer ce qui ne se laisse pas fixer, une part de temps irréversible, peut-être celui de ma propre vie. Il y avait en moi la nécessité d’apaisement, une énergie à mettre en lumière en traversant mes propres ombres, une mise à l’épreuve.



En silence j’aurai restauré, tu auras conservé…
il – elle aura protégé,
un futur antérieur
Peut-être une autre année, un avril pulvérisé…
la fin du dernier jour
Où en étiez-vous quand c’est arrivé ?
Je ne sais pas si tout s’est arrêté ; ce que je sais, c’est le choc, la brutalité.
Tout a volé en éclats. On n’a pas idée du fracas !
Des larmes, puis le silence… pour affronter la douleur
Je ne peux pas occulter cette blessure ; je la regarde pour ce qu’elle est : une entaille radicale.
Panser, donner une chance aux choses finissantes, aux petits riens sacrés.
Peut-être que ça continuera encore un peu ?
Qu’est-ce que je garde ? Qu’est-ce que je jette ?
Je suis désemparé ! Faut-il tout démonter pour réparer ?
J’aurai déposé de ton or dans les fissures des visages, sur tous les restes à recoller,
les fragments éparpillés, les souvenirs disjoints, les âmes morcelées.
J’aurai enluminé les cicatrices… relié une vie à une autre.
J’aurai tenté de libérer la lumière qui affleure sous l’enveloppe des choses.
Nous aurons réparé.



Entre le secret de choses et la poésie se crée un lien. Je le définirais comme une attente et au-delà, une réponse à ce que je vis, ce flux que j’entretiens avec des objets et matériaux de la nature, leur troublante étrangeté, le mystère qui règne autour d’eux. Leur offrant une image déformée par ma sensibilité et mes sensations, je les transfigure. Par des rapprochements insolites, par des analogies suggestives, je tente de rendre sensible un monde encore inconnu, une évidence sentie.
La poésie accomplit une traversée des (cinq) sens et des matériaux, où les mots se télescopent, se heurtent comme des objets réels. Elle tente de rendre intelligible la perception de mes expériences sensibles, concrètes.

Inquiétante merveille
tapie dans l’ombre
juste là
Et si ça racinait
dans la fissure
J’ai voulu essayer
pour voir ce que ça faisait
ressasser la beauté
autour de toi

En vos silencieuses réclusions
vous m’expliquez le monde
Fleurissez une à une
herbes rares
Jour après jour
je me souviens
moi qui ai tiré tous ces traits
Espérer et écrire

Obstinément décrire
vos ombres délabrées
Du tissu de la guerre
de tout l’exil
Du silence sous les pierres
de croire aux visages entrevus
La preuve
de tous mes êtres

Du fleuve à la mer
du cœur au corps
Une empreinte
un stigmate
Oscillation tranquille
la plénitude du vent
Des arpèges de verre
infiltrés sous la peau
Comme si de rien n’était
on a toujours le chagrin

Un arbre scié
des corps dissipés
une stèle déplacée
Quand c’est trop fort
je perds le goût
Les visages rayés
comme des brumes
au-dessus des immortels
C’est tellement infini
ces gestes célestes

Expositions- Installations :
– «Résidence secondaire » Installation 32 rue froide Angoulême décembre 2024 – février 2025
– Exposition Dynamique des fluides Atelier IMIS Montignac-Charente 2024
– «Jeter un voile» Installation Abbaye de La Couronne juillet 2022
– « Qui habite chez qui ? » les oiseaux du jardin Atelier IMIS septembre 2021
– Installation C.L.O.U.D pour l’exposition « Intimes… » Atelier IMIS 2020
– Installation « d’autres pas… » pour l’exposition «Fragilités » Atelier IMIS 2019
– «Les illusions» installations Atelier IMIS 2018
– « Manimal » Chabram² juillet 2018
– « Petits mondes flottants » Galerie Marland Angoulême mai 2018
– « Proximités – Distances » installations Atelier IMIS 2017
– « Mémento » exposition Atelier Pélardy Mansle septembre 2016
– « Du rempart au grenier » Maison – Isabelle et le VRAC Angoulême mai 2015
– « ZOU » Hameau de La Brousse avril 2015


Poésie :
– « A l’œil » recueil de poésie édité par l’Atelier IMIS dans la collection « les carnets de l’impatience » 2024
– « Dans les temps » recueil de poésie édité par l’Atelier IMIS 2023
– « dialogues » Poésie, musique, vidéo avec Nnuccia et Pierre Martin à l’Atelier IMIS à l’occasion de la sortie du recueil « Dans les temps » mars 2024
– Marché de la poésie Editions de l’Atelier IMIS – Paris 18/22 juin 2025
– Installations – Expositions – Lectures Lire en ville Montbron 10/15 juin 2025